DIM - Une Marine de combat qui fait grandir les talents de son équipage

Publié le 16/01/2025

Auteur : La rédaction

Pour remplir ses missions et répondre à des défis de plus en plus exigeants, la Marine a besoin de marins formés, entraînés et compétents dans des domaines en évolution constante. L’objectif est de dynamiser les parcours et de faciliter la progression professionnelle. La Marine renforce depuis près de trois années sa politique des ressources humaines (RH) en plaçant le marin au coeur de ses préoccupations, en vue d’armer ses unités opérationnelles de marins motivés et aptes au combat. Cela s’accompagne de dispositifs de gestion plus agiles et davantage individualisés.

Chaque marin développe, au cours de sa carrière, ses compétences de façon continue et acquiert progressivement plus de responsabilités. L’acquisition de compétences techniques et de savoir-faire opérationnels, l’entretien de la résilience fondée sur la résistance physique et mentale et le développement du savoir-être constituent trois piliers qui structurent le parcours de chaque marin. La formation, en école ou en unité est une condition indispensable pour développer et entretenir ces aptitudes qui permettent in fine aux marins d’accomplir leurs missions avec un haut niveau opérationnel et technique. La formation est d’ailleurs en constante évolution : les écoles modernisent leurs outils pédagogiques, notamment connectés. L'expérience et la valeur professionnelle des marins, acquises dans la succession d’affectations variées, sont quant à elles valorisées en rationalisant les efforts de formation grâce au processus de validation des compétences acquises (VCA) et au développement des formations continues modularisées (FCM). Ces évolutions sont essentielles pour faire la différence demain au combat.

Les marins doivent également se préparer à faire face à un large spectre d’engagement allant jusqu’à la haute intensité. Cela passe d’abord par une disponibilité statutaire accompagnée au quotidien de manière de plus en plus individualisée, permettant de concilier plus facilement vie professionnelle et vie privée. Autre élément indispensable à la victoire au combat : l’esprit d’équipage. Fondement de relations équilibrées entre marins, y compris dans un contexte mixte, il doit continuer à être insufflé au sein des unités. Enfin, la Marine s’appuie sur une réserve opérationnelle qui se développe, se transforme et dont l'emploi évolue pour s’intégrer pleinement à l'armée d’active. Consciente du caractère fondamental du soutien apporté par les familles des marins, la Marine les accompagne et les épaule. Ainsi, la politique RH s’applique à prendre en considération leurs attentes et leurs besoins, mais également à leur procurer un accès plus direct à l’information grâce à de nouveaux outils leur permettant d’être impliquées dans la vie d’équipage des marins partis en mission. Dans une dynamique de croissance quantitative et qualitative de ses RH, la Marine se transforme pour être prête à mener les combats de demain. Elle met en oeuvre de nombreuses réformes, pour armer ses unités de marins combatifs, investis et épanouis

FORMATION

Oeuvrant dans tous les milieux (1) et avec les équipements parmi les plus complexes au monde, la Marine exige un haut niveau professionnel. La formation joue donc un rôle central avec l’incorporation de près de 4 000 jeunes par an, et l’accueil de plus de 20 000 élèves par an dans 35 écoles et centres de formation. L’enjeu de la formation est de conserver les savoir-faire uniques à l’Institution tout en s’adaptant aux nouveaux enjeux du combat naval. Ainsi, certaines compétences connaissent une stabilité relative : un moteur thermique fonctionne globalement de la même manière depuis un siècle, même si mécanique et électricité sont de plus en plus intriquées aujourd’hui. D’autres connaissent des évolutions brutales et nombreuses, avec une rapide obsolescence (ex : système d’exploitation d’un ordinateur valable moins de 18 mois).

 

Enfin, quelques nouvelles compétences bouleversent la manière de faire la guerre, comme la gestion de la donnée et l’IA, ou encore l'usage de drones. La formation s’adapte pour répondre à ces enjeux. Ainsi, la FCM est une nouvelle façon d’accéder au brevet supérieur (BS). Le marin alterne affectations et périodes d’enseignements académiques à l’issue d’un BAT. Après une formation initiale renforcée, il valide progressivement et de manière optimisée les attendus d’une formation de BS. Forte de retours positifs des aménagements effectués pour la spécialité détecteur anti-sous-marin (DEASM), la démarche est progressivement étendue à d’autres spécialités (GUETF, ELEC, etc.).

 

PRÉPARATION DES MARINS DE COMBAT

Une fois recrutés et formés, les marins doivent se préparer au combat. Cela passe d’abord par un accompagnement individualisé leur garantissant un meilleur équilibre personnel et leur permettant de focaliser leur énergie sur la finalité opérationnelle. Ainsi, le déroulement de carrière est simplifié : gestion individualisée, contraintes de mobilité réduites par extension du mode de sélection au BS au titre d’un bassin de 15 spécialités, afin de garantir une mobilité fonctionnelle post-BS sans imposer une mobilité géographique avec faible préavis.

L’acquisition de compétences est une composante essentielle de la réussite au combat. La progression professionnelle, à travers une variété fonctionnelle des affectations, est encore plus valorisée qu’avant, comme l’atteste la création des BHT (1) et des C/CDM (2) en lieu et place des BM(3). Elle est également simplifiée pour les marins souhaitant accéder au BAT par VCA. Ferments culturels de cohésion et gages de réussite opérationnelle, l’esprit d’équipage et les fondamentaux du savoir-être insufflés dès les bancs de l’école, sont constamment rappelés et cultivés tout au long de la carrière.

La culture du commandement est renforcée, comme l’atteste la mise en place d’une formation à l’exercice de l'autorité (EXA) pour les OM/ OMS, afin d'améliorer leurs capacités à encadrer et ainsi renforcer les performances des équipages. La Marine renforce également sa résilience en faisant appel à une réserve rénovée et démultipliée, structurée en flottilles de réserve opérationnelle et déclinées en trois types d’unités : les «flottilles de réserve maritimes» (FRM), qui appuient les forces maritimes de la Marine (4) et sont des réservoirs de force constitués de jeunes opérateurs, gérés et encadrés au sein d'unités commandées par des réservistes expérimentés. Les «flottilles de réserve spécialisées» (FRS), qui sont constituées de réservistes opérationnels experts employés dans des domaines variés au sein de toutes les formations de la Marine ainsi que dans des domaines d’expertise tels que le numérique/cyber, la formation, le droit, la logistique et le maintien en condition opérationnelle, et les «flottilles de réserve côtières» (FRC).Ces dernières seront déployées le long des côtes et outre-mer afin d’étendre la capacité d’action de la Marine le long du littoral, et de renforcer son empreinte littorale avec des emprises localisées en dehors des grands ports militaires.

Former et préparer des marins épanouis et aptes au combat est un enjeu essentiel pour la Marine qui s’appuie sur les talents de chacun.

 

L’ACCOMPAGNEMENT DES MARINS

Dans l’objectif de renforcement des forces morales de la Marine comme dans celui de la fidélisation, l’accompagnement des marins se traduit par l’amélioration des conditions de vie et de travail, et par la prise en compte de l’environnement social de chacun.

Pour cela, la direction du personnel de la Marine participe à l’élaboration des mesures ministérielles en faisant valoir les spécificités du métier de marin, et dispose de leviers qui lui sont propres.

Dans le but de renforcer la performance des équipages, l’administration des marins évolue. En 2024, ce sont 31 nouveaux bureaux des ressources humaines (BRH) qui ont été créés (15 à Brest/Lorient, 13 à Toulon, 2 à Cherbourg et 1 à Tours). Cette réforme se poursuivra en 2025 et 2026. À terme, tous les marins affectés dans l'Héxagone seront administrés au plus près de leur affectation, à l’image de la proximité connue dans les unités navigantes. La meilleure prise en compte des contraintes opérationnelles étant une priorité, l’accès à certaines prestations de l’action sociale des armées comme pour la garde des enfants sera progressivement facilité dans le prolongement des mesures déjà engagées en 2024. Autre ambition : davantage tenir compte de la mobilité géographique et de la progression professionnelle s’agissant de l’offre apportée en matière de logement. Cela concerne tant le parc géré par le ministère que l’aide à la recherche de logement hors parc ; sans oublier les marins en situation de célibat géographique.

 

Accompagner l’emploi des conjoints est également au nombre des actions à amplifier, en métropole, outre-mer et à l’étranger, tout comme celles visant la cohésion avec les familles dans le cadre des mesures ministérielles ou des initiatives et subventions propres à la Marine.

Enfin, le soutien aux blessés, aux malades et aux familles endeuillées demeure au coeur de l’attention de la Marine, à tout niveau et en premier lieu à celui du commandement

40 ans de l'explosion du boulevard Périer : un drame qui a marqué l'histoire du Bataillon

Publié le 06/02/2025

Auteur : La rédaction

Le 5 février 1985, un drame majeur frappe la ville de Marseille : une double explosion détruit un immeuble du boulevard Périer (8ème arrondissement). Six personnes, dont un marin-pompier, y perdront la vie. Près de quarante seront blessées. 40 ans après, le récit de cet événement reste vif dans les casernes : les « anciens » transmettent aux plus jeunes marins-pompiers les enseignements qu’ils ont pu tirer de cette intervention pour assurer une meilleure sécurité sur le terrain.

Mardi 5 février 1985, 14 h 57. Un appel est reçu par le centre opérationnel des services de secours et d’incendie de la ville de Marseille : une fumée suspecte s’échappe d’un soupirail au 2 boulevard Périer. L’alerte pour feu de cave semble anodine pour les marins-pompiers de la caserne de Louvain. Une première équipe, menée par l’enseigne de vaisseau Francis Pouey, est dépêchée sur place. En quelques minutes, trois engins armés par 19 marins-pompiers sont alignés devant l’immeuble.

Une équipe de reconnaissance tente d’accéder aux caves, mais la porte d’entrée est verrouillée. Un employé du garage voisin facilite leur progression. Lorsqu’ils s’engagent dans l’escalier, ils constatent la destruction des installations électriques par les flammes avec une légère fumée, mais ne sentent pas l’odeur de gaz, masquée par l’incendie. Sur les ordres du commandant des opérations de secours, un contrôle des étages supérieurs est engagé, tandis que Gaz de France s’organise pour sécuriser les conduites de gaz.

Le fourgon pompe-tonne incendie engage une attaque prudente. Au sous-sol, les marins-pompiers découvrent des cartons se consumant lentement et maîtrisent rapidement le feu. La situation semble sous contrôle, lorsqu’un événement inattendu vient faire basculer l’intervention.

À 15 h 17, une double explosion éventre l’immeuble. La première déflagration soulève le toit et projette la structure sur la chaussée blessant de nombreux civils. La seconde, dans un souffle violent, tue sur le coup le quartier-maître Patrick Repetto et blesse gravement une quarantaine de personnes, dont dix-neuf marins-pompiers. L’onde de choc projette certains hommes contre les façades avoisinantes. Le quartier-maître Laurent Marino perd ses deux jambes dans l’explosion.

Aussitôt, les renforts affluent des casernes avoisinantes, notamment Endoume. Les sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône apportent également leur aide. Chaque seconde compte pour extraire les victimes des décombres. Les hôpitaux marseillais accueillent les nombreux blessés, dont certains seront marqués à vie. Le bilan est lourd pour Marseille et le Bataillon.

L'explosion du boulevard Périer

Depuis 40 ans, les marins-pompiers rendent hommage aux disparus et blessés du boulevard Périer, avec une émotion particulière au sein du CIS Louvain. La mémoire du quartier-maître Repetto et celle des autres victimes civiles et militaires restent vives.

Cette année, la cérémonie s’est tenue sur le boulevard Périer pour commémorer les 40 ans de ce drame qui aura marqué l’histoire de la ville et du Bataillon. Étaient présentes de nombreuses autorités civiles et militaires, d’anciens marins-pompiers ayant vécu l’explosion, des délégations de la Police nationale et du Gaz réseau de France (GRDF, ex-GDF) également endeuillées. Une centaine de marins du feu en activité, l’Amicale des marins-pompiers, les cadets et les jeunes marins-pompiers se sont rassemblés avec une lecture du déroulé des événements. Enfin, une plaque commémorative retraçant l’histoire du sinistre a été révélée afin que perdure la mémoire de cet incident à travers les âges.

Ce drame marque un tournant dans la gestion des interventions en milieu clos : abandon progressif des casques traditionnels au profit du casque F1, consignes de sécurité renforcées, changement d’approche des risques liés au gaz et approche plus prudente des feux en sous-sol.

La transmission de ce récit entre générations rappelle à chaque marin-pompier que derrière une simple fumée peut se cacher le pire des dangers.

Cérémonie du 5 février 2024

Victimes décédées sur les lieux :

  • Patrick REPETTO (QM1 marin-pompier, servant au FPTL)

  • François FERRANTE (policier)

  • Pierre FALANGA (GDF)

  • Adrien SPOTIELLO (employé garage Datsun)

  • Denis BRETIN (dans son véhicule Bd Périer)

Victime décédée des suites de ses blessures au CHU Timone

  • Patrick BLANQUER (GDF).

DIM- Organisation, une structure simple et agile

Publié le 16/01/2025

Auteur : La rédaction

Les unités de la Marine dépendent de deux chaînes de commandement distinctes : le commandement opérationnel qui emploie les forces en opération et le commandement organique qui les prépare pour cet objectif.

LE COMMANDEMENT OPÉRATIONNEL

Le chef d’état-major des armées (CEMA) commande les opérations militaires. C’est à l’autorité militaire de la zone géographique concernée que revient le contrôle opérationnel des unités déployées. En métropole, ces autorités, qui sont également préfets maritimes, sont les commandants des trois zones maritimes (CZM) : la zone maritime Atlantique (CECLANT), la zone maritime de la Méditerranée (CECMED) et la zone maritime de la Manche et de la mer du Nord (COMNORD). Les forces déployées outre-mer sont placées sous commandement interarmées dirigé par des commandants supérieurs des forces armées outre-mer (COMSUP). Quant aux forces déployées à l’étranger, elles sont sous les ordres d’un commandant des forces stationnées à l’étranger (COMFOR). Enfin, les missions qui relèvent de l’action de l’État en mer (AEM) sont placées sous l’autorité du Premier ministre. En métropole, elles sont sous la coordination des préfets maritimes. Outre-mer, elles sont sous celle des délégués du gouvernement pour l’action de l’État en mer, assistés des commandants de zone maritime

 

LE COMMANDEMENT ORGANIQUE

La responsabilité première du chef d’état-major de la Marine (CEMM) est de tenir à disposition du chef d’état-major des armées (CEMA) une Marine prête au combat. Cela nécessite d’entraîner les forces, de les qualifier et de les préparer au combat sur tous les plans. Il s’appuie pour cela sur quatre autorités organiques réparties par milieu d’emploi :

• L’amiral commandant la Force d’action navale (ALFAN) pour les forces de surface.

• L’amiral commandant la Force océanique stratégique(ALFOST) pour les sous-marins.

• L’amiral commandant la Force de l’aéronautique navale (ALAVIA) pour les aéronefs.

• L’amiral commandant la Force des fusiliers marins et commandos (ALFUSCO) pour les fusiliers marins et commandos Marine.

Le CEMM s’appuie également sur la gendarmerie maritime : une formation spécialisée de la gendarmerie nationale mise pour emploi auprès de lui. Son commandement est exercé par le commandant de la gendarmerie maritime (COMGENDMAR).

DIM - Les enjeux maritimes

Publié le 16/01/2025

Auteur : La Rédaction

Lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la communauté internationale a pris conscience d’un changement d’ère stratégique : d’une situation où les rapports entre États se concevaient d’abord en termes de compétition plus ou moins loyale, le monde a basculé dans un environnement où la contestation voire l’affrontement réapparaissent comme le mode normal de règlement des conflits dans les relations interétatiques.

Cette contestation s’exprime de manière privilégiée dans les espaces communs, qui offrent davantage de liberté d’action. A la fois physique et fluide, l’espace maritime est attractif pour des acteurs souhaitant affirmer leur puissance : les actions s’y exercent loin des populations tout en cumulant pouvoirs de nuisance et de démonstration, à l’image du sabotage des gazoducs Nord Stream en 2022. L’océan est donc singulièrement exposé aux troubles mondiaux. Le phénomène se manifeste d’abord par une compétition exacerbée pour accéder à ses ressources. Les produits de la pêche, dont 20 % seraient prélevés de manière irrégulière, concentrent les convoitises, tandis que le sable, les ressources des fonds marins, l’eau de mer elle-même, aiguisent les appétits et deviennent des enjeux stratégiques pour les compétiteurs. L’appropriation de l’espace maritime, dans une logique de revendication territoriale ou d’usage (implantation d’éoliennes par exemple), apparaît comme une forme aboutie de ce phénomène de captation. À l’avenir, la déclaration abusive d’aires protégées dans des espaces hors juridiction pourrait en constituer une manifestation insidieuse.

La contestation se lit également à travers le dérèglement des flux. Si le monde se fragmente, l’intensité des échanges ne faiblit pas, dressant un tableau de plus en plus anarchique. Les attaques houthies en mer Rouge sur des centaines de navires marchands depuis novembre 2023 constituent peut-être la démonstration la plus spectaculaire de ce dérèglement. Mais celui-ci prend également la forme de l’explosion des flux irréguliers : trafics d’êtres humains, de drogues ou d’armes qui, instrumentalisés, peuvent constituer autant de vecteurs de déstabilisation des États. Ou encore celle de la manipulation des flux, avec le phénomène de dark fleet, flotte fantôme, ce système de contournement des sanctions par le recours à des navires vieillissants et assurés par des sociétés opaques qui font peser des risques environnementaux majeurs sur les espaces maritimes.

Le cumul de l’ensemble de ces dérèglements, coordonnés, exacerbés, est susceptible de franchir un cap et de déboucher sur une confrontation armée. Celle-ci peut résulter d’une erreur de calcul, à mesure que les marines réarment et que la densité des navires militaires en mer augmente. Elle peut aussi être délibérée de la part d’un perturbateur souhaitant montrer sa détermination sinon acquérir la maîtrise de la mer, en tirant parti du caractère foudroyant du combat naval : il faut des années pour construire un navire, quelques secondes pour le détruire. Au bilan, il s’agit pour la Marine de se préparer à tous les scénarios, à tous les combats, depuis des missions de lutte contre les trafics jusqu’au combat naval destructeur et décisif.

Lettre Hebdomadaire N°04 du 7 février 2025

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Ursula Pacaud-Meindl : "Les sous-mariniers me voyaient comme l'un des leurs"

Publié le 01/06/2022

Auteur : ASP Anne-Claire Lefetz

Allemande, fille d’un général, elle a vécu la guerre dans l’Allemagne nazie. Pionnière de l’acoustique sous-marine, la Marine lui doit en partie son excellence dans la lutte anti-sous-marine. Recrutée en 1947 par la direction des constructions et armes navales, Ursula Pacaud Meindl se spécialise dans l’identification du bruit rayonné dans l’eau par les bateaux. « Mère » des oreilles d’or, son bateau-laboratoire d’acoustique deviendra l’un des plus importants centres en Europe et jouera un rôle prépondérant dans la formation des jeunes ingénieurs et techniciens de la Marine.

Après avoir fêté ses 100 ans le 15 mars, Ursula Pacaud-Meindl revient pour Cols bleus sur sa riche carrière au service de la Marine nationale, et plus particulièrement sur son rôle d’ingénieur au sein du laboratoire acoustique de la Direction des constructions et armes navales (DCAN) de Toulon. Sa spécialité : la mesure du bruit rayonné par les bâtiments en mer. Ainsi, avec son équipe du laboratoire du Brusc (à Six-Fours-les-Plages dans le Var), elle a réalisé pas moins de 1 140 mesures de bruits rayonnés dont 734 sur sous-marins. Une activité soutenue qui lui vaut aujourd’hui d’être considérée comme la mère de nos oreilles d’or.

Cols bleus : Quel a été votre rôle au sein du laboratoire de détection sous-marine ?

Ursula PACAUD-MEINDL : En 1955, j’ai eu la charge d’organiser ce service qui avait pour mission d’écouter le bruit que font les différents bâtiments en mer. Ils rayonnent tous dans l’eau, avec leurs hélices, leur moteur. Et, pour les sous-marins, c’est excessivement dangereux. C’est uniquement par ce bruit qu’ils peuvent être détectés, donc ils doivent être le plus silencieux possible. Je suis partie de zéro et, petit à petit, c’est devenu un service très important et internationalement connu. Nous étions également chargés de surveiller les sous-marins nucléaires à chaque appareillage. C’était un grand travail pour mon équipe et de grandes responsabilités.

 

C. B. : Comment êtes-vous arrivée à la tête du laboratoire de détection sous-marine ?

U. P-M. : Justement, c’est ça qui est incroyable. Je n’étais pas issue d’une grande école. Je suis allemande et à la fin de la guerre, alors que j’étais dans l’industrie, on m’a dit que je devais aller en France. Je savais que j’allais travailler pour la Marine nationale, mais c’est tout. Avant de partir, je suis allée voir mon père, général allemand alors prisonnier de guerre en Angleterre, et il m’a dit : « C’est très bien, montre-leur un peu comment nous sommes en vérité ! » Cette phrase m’a accompagnée tout au long de ma vie. Quand je suis arrivée en France, d’abord à Saint-Raphaël, j’ai rencontré un physicien qui faisait de l’acoustique sous-marine. On étudiait ensemble les problèmes des torpilles, et c’est lui qui m’a appris énormément sur le sujet. Après, j’ai été mutée à Toulon.

 

C. B. : Vous avez étudié l’acoustique des sous-marins en pleine guerre froide. Comment décririez-vous cette période ?

U. P-M. : Nous avions un dur travail pendant la guerre froide, ça c’est certain. Il y avait beaucoup de tensions et tout ce qu’on faisait était couvert par le secret défense. Récemment, j’ai reçu la lettre d’un amiral dans laquelle il m’écrit, à propos de cette période : « Madame, vous étiez notre assurance vie ».

C. B. : Il y a 55 ans, Le Redoutable était « lancé » à Cherbourg. Quels souvenirs gardez-vous de ce moment ?

U. P-M. : C’était le premier sous-marin français à propulsion nucléaire, et j’avais en charge ses mesures d’entrée en service, c’est-à-dire l’analyse de beaucoup de passes devant nos appareils pour tout décortiquer. Mais comme pour tous les sous-marins nucléaires de cette époque, j’ai fait les mesures à l’entrée en service et les surveillances à chaque appareillage. Je les suivais tous, pas seulement Le Redoutable.

 

C. B. : Comment avez-vous vécu le fait d’être une femme, qui plus est d’origine allemande, dans l’univers de la Marine nationale après la Seconde Guerre mondiale ?

U. P-M. : Finalement, ma vie a quelque chose de complètement hors du commun. J’étais la fille d’un général allemand très connu, un ex-ennemi en quelque sorte. Mais quand je suis arrivée en France, cela ne m’a jamais posé problème. Je n’oublierai jamais la largesse d’esprit des Français et leur accueil. Et être une femme dans ce milieu ne m’a jamais posé problème non plus. Ce qui était important, c’était que je travaille correctement. Et puis, j’étais très directe dans mon travail et finalement un peu intraitable.

 

C. B. : Et vous avez embarqué à bord de sous-marins nucléaires ?

U. P-M. : Oui, je me souviens particulièrement d’un embarquement de huit jours sur un sous-marin nucléaire où je devais être présente à bord pendant que le bâtiment faisait sa mesure de bruit rayonné. Là, c’est le seul moment où j’ai compris que ce n’était peut-être pas tout à fait ordinaire que je sois à bord, en tant que femme. Un amiral qui avait embarqué en même temps que moi pour l’occasion est venu me voir avant de repartir et m’a dit : « Vous n’ignorez pas que j’étais contre votre embarquement, mais je vous ai observée et je vous félicite pour votre travail ».

C. B. : Un événement vous a-t-il particulièrement marquée pendant votre carrière ?

U. P-M. : Ce qui m’a énormément touchée, c’est la confiance que la Marine a eue en moi au moment où La Minerve s’est perdue, en 1968. Un officier de Marine est arrivé chez moi, un soir, vers 23 heures, et m’a dit : « Ursula, Ursula, dépêchez-vous, on a besoin de vous ! » Dans la voiture, il m’explique alors que La Minerve s’est perdue et me demande si je peux écouter pour déceler des bruits de l’équipage à bord. On m’a alors emmenée sur une embarcation rapide pour rejoindre en mer un escorteur d’escadre. On m’a mis un casque sur les oreilles et on m’a demandé si j’entendais quelque chose. Je suis restée trois ou quatre heures comme ça, mais malheureusement, il n’y avait plus rien à entendre. Ça m’a énormément touchée, car cela a montré qu’ils avaient confiance en moi, même dans un moment si terrible. Les sous-mariniers, en qui j’ai toujours eu une confiance aveugle, me voyaient comme l’un des leurs. 

En juillet 2022, au CIRA, Mme Ursula Pacaud Meindel remet aux nouveaux analystes en guerre acoustique passive leur chronomètre, indispensable dans l'exercice de leurs fonctions

 

En savoir plus :

Une mesure de bruit rayonné est réalisée par une station d’écoute en présence du bâtiment à étudier, pendant une ou plusieurs heures. En effectuant des passages devant des hydrophones (microphones plongés dans l’eau), le bâtiment réalise alors ce que l’on appelle des passes correspondant chacune à une vitesse, une immersion et des réglages effectués à bord. Pour les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), les mesures étaient effectuées à l’entrée en service (20 passes) et à chaque départ en patrouille (3 à 6 passes).

La Marine à Nancy : embarquement imminent

Publié le 03/02/2025

Auteur : La rédaction

La Marine mouille l’ancre à Nancy et s’invite sur la place Stanislas pour le forum des métiers aux salons de l’Hôtel de Ville, du vendredi 28 février au samedi 1er mars 2025, de 9h00 à 18h00.

L’événement s’adresse aux lycéens, étudiants et demandeurs d’emplois âgés de 16 à 30 ans du niveau 3e à Bac+5. Aéronautique navale, forces sous-marines, renseignements, énergie électrique et nucléaire, opérations navales, restauration, numérique… Les visiteurs découvriront 80 métiers et 14 domaines d’emploi dans lesquels la Marine recrute et forme annuellement plus de 4 000 jeunes femmes et hommes. Vaste panel qui promet aux jeunes esprits d’étancher leur soif d’aventure. Sur place, des marins seront présents pour rencontrer les jeunes, partager leur expérience, répondre à leurs questions et, on l’espère, faire naître de nouvelles vocations.

 

Lettre hebdomadaire n° 5 du 14 février 2025

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Lettre hebdomadaire n° 5