Propulsion nucléaire : la Marine passe un cap

Publié le 06/07/2025

Auteur : La Rédaction

500 années.réacteur ! C’est le cap doublement symbolique d’expérience de la Marine nationale en matière d’exploitation nucléaire.

Sachant qu’une année.réacteur représente une année d’exploitation d’un réacteur nucléaire, cela revient à imaginer l’exploitation d’une telle installation par la Marine nationale depuis 1525, sous le règne de François Ier ! Pour la Marine nationale, ce nombre traduit la durée cumulée d’exploitation des différentes chaufferies embarquées des bâtiments à propulsion nucléaire : sous-marins nucléaires lanceur d’engins (SNLE), M4, sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) de type Rubis, SNLE 2G, porte-avions Charles de Gaulle et SNA type Suffren. Bientôt, nous pourrons y ajouter le SNLE 3G et le porte-avions de nouvelle génération.

Ce cap est en premier lieu le symbole d’un héritage car la propulsion nucléaire française est à mettre au crédit d’une détermination politique qui a permis le lancement en 1955 du projet de sous-marin nucléaire Q244. C’est ensuite la détermination du temps long et l’audace, incarnée en particulier par l’ingénieur Jacques Chevallier puis l’esprit pionnier des atomiciens sous-mariniers qui ont exploité les premières installations nucléaires de propulsion de navires de la Marine française. C’est enfin la volonté de transmettre et de partager, génération après génération, les compétences et l’expérience acquises « au fil de l’eau » et « au fil des neutrons », qui a rendu possible l’accumulation progressive et rigoureuse de 500 années.réacteur.

Ce cap est également un symbole relatif : celui de l’expérience de la Marine nationale en matière d’exploitation nucléaire. À titre de comparaison, le groupe EDF, premier exploitant nucléaire au monde, avec 57 réacteurs en service en France depuis le raccordement au réseau du réacteur pressurisé européen (Evolutionnary Pressurizzed Reactor, EPR) de Flamanville, cumule plus de 2 500 années.réacteur. La Marine nationale est le deuxième exploitant nucléaire français, avec un « parc » de 12 chaufferies nucléaires embarquées dans le format à un porte-avions (deux réacteurs), six SNA et quatre SNLE. Grâce à son expérience et à l’image qu’elle renvoie, l’Institution bénéficie de coopérations régulières et étroites avec EDF, avec différents acteurs représentant la filière nucléaire civile tels que l’université des métiers du nucléaire (UMN) et le groupement des industriels français de l’énergie nucléaire (GIFEN). Cette crédibilité de la Marine nationale en qualité d’exploitant nucléaire est un héritage qu’il revient à chaque atomicien d’entretenir dans la durée.

 

Un peu d’histoire : une odyssée à la française

Avec la maîtrise de l’énergie nucléaire, les marins voient arriver la solution à bon nombre de problèmes rencontrés depuis l’invention de la propulsion navale mécanique. Retour sur les prémices de cette révolution.

Au début du XXe, les sous-marins doivent fréquemment naviguer en surface pour recharger leurs batteries. Cette vulnérabilité est de surcroît aggravée par une faible vitesse en plongée et une autonomie limitée par la taille du réservoir de carburant. En 1942, le premier réacteur à fission nucléaire va changer la donne. Sous la férule de l’amiral Hyman George Rickover, le programme de propulsion nucléaire permet, dès 1955, à la marine américaine de lancer son premier sous-marin nucléaire d’attaque, le Nautilus. Cinq ans plus tard, le premier navire de surface nucléaire, le croiseur Long Beach entre en service, suivi par le porte-avions nucléaire Enterprise. Les avantages sont indéniables. L’autonomie, elle, n’est plus limitée que par l’approvisionnement en vivres et le besoin de repos de l’équipage. Le gain de place : plus de réservoir de carburant de propulsion, il est donc possible d’embarquer plus de munitions ou de carburant aviation pour les portes-avions. Pour les sous-marins, c’est encore plus net, il n’est plus nécessaire de faire surface pour recharger les batteries, la vitesse en plongée est multipliée par deux par rapports aux « classiques » et le navire peut tenir l’allure sous l'eau pendant de nombreuses semaines. Enfin, le réacteur fait très peu de bruit.

Réacteurs tricolores

En France, le projet Q244 - un sous-marin équipé d’un réacteur à l'uranium naturel et à l'eau lourde  - est abandonné du fait de son poids et de sa taille inadaptés pour un bâtiment de ce type. En 1959, un programme de sous-marins à propulsion nucléaire est lancé, visant à contrôler l'ensemble de la conception et de la réalisation. La France obtient des Américains de l’uranium enrichi, uniquement pour mener ses expérimentations de mise au point d’un prototype à terre (PAT) de réacteur à eau pressurisée, seul modèle de réacteur suffisamment compact pour être embarqué. L’expérimentation est menée par le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et le prototype entre en service en 1964 sur le site de Cadarache. Il va permettre la mise au point d’un réacteur nucléaire opérationnel. En parallèle, la construction du sous-marin nucléaire lanceur d’engins Le Redoutable a débuté. Ne reste plus qu’à produire de l’uranium enrichi. C’est le cas à partir de 1964, avec l’ouverture de l’usine d’enrichissement d’uranium de Pierrelatte. En 1971, Le Redoutable entre en service, la propulsion nucléaire navale française est en marche.

1948 : Premier réacteur nucléaire de recherche français.

1964 : Divergence du prototype à terre (PAT). Premier réacteur européen à eau légère pressurisée.

1971 : Admission au service actif du premier SNLE Le Redoutable.

1974 : Divergence de la chaufferie avancée prototype (CAP), sur le site de Cadarache.

1983 : Admission au service actif du premier SNA de type Rubis.

1999 : Premiers essais à la mer du porte-avions Charles de Gaulle.

2006 : Lancement du programme Barracuda (SNA).