Pierre Landais, un Malouin aux Amériques
Publié le 11/06/2025
Ce premier roman du capitaine de vaisseau Vincent Guéquière ressuscite avec force une figure oubliée de l’Histoire franco-américaine, aux côtés de Benjamin Franklin et du marquis de La Fayette.

Quelle audace de se saisir d’un capitaine au long cours que l’Histoire a jeté aux oubliettes et à qui ses contemporains n’ont pas jugé digne d’ériger une statue de héros. Pourtant il y a bien de quoi graver une légende. Vincent Guéquière s’est donc lancé dans un hommage en forme de réhabilitation.
Pierre Landais, officier de la Marine royale, ayant combattu les Anglais et fait le tour du monde aux côté de Bougainville, a bien des allures d’anti-héros lorsque la bonne fortune semble l’abandonner au début du règne de Louis XVI. Il n’obtient pas la Croix de Saint-Louis tant attendue pour services rendus à la France et n’est pas non plus entendu lorsqu’il demande la charge de capitaine du port de l’Isle de France (Maurice).
De guerre lasse, il s’engage auprès de Benjamin Franklin et des Insurgents dans la guerre d’indépendance des futurs États-Unis d’Amérique. 1001 coups du sort l’attendent encore malgré des traversées de l’Atlantique manœuvrées avec succès. Son destin sera celui du mal-aimé.
Si ce capitaine, devenant fou, s’est égaré, il y en a un qui a parfaitement trouvé son chemin : c’est l’auteur de ce premier roman, Vincent Guéquière, lui-même capitaine de vaisseau dans la Marine nationale. À se demander, en lisant sa prose, si les études d’ingénieur et la maîtrise du génie atomique ne favoriseraient pas aussi une appétence et des dons littéraires. C’est plutôt rassurant pour la Marine nationale actuelle d’y trouver la combinaison heureuse des chiffres et des lettres. Quitte à choisir, prenons les deux.
Les jaloux diront que le sujet du livre, la vie d’un Malouin, commandant d’un navire qui réussit une première traversée en 1777, au nez et à la barbe des Anglais pour livrer des armes aux colons américains, était du pain béni pour un marin. Pourtant la réussite de ce premier roman historique tient tout autant à son personnage principal qu’à son style : un classicisme dans la forme qui n’empêche pas sa langue impeccable de se mouvoir ni d’être gracile, chaloupée comme la houle. En commandant, maître de son navire, Vincent Guéquière a parfaitement piloté son entrée en littérature. On lui souhaite de naviguer longtemps.
Le capitaine égaré, de Vincent Guéquière
Paulsen, 384 p., 21 €.