Marins de combats - Cap sur les Jeux
Publié le 01/07/2024
Ils sont treize. Treize sportifs de haut niveau, du judo à la voile, du kitesurf au canoë (ici, la céiste Eugénie Dorange, à Toulon avec l’équipage de la FREMM Alsace, le 18 juin dernier), représentant fièrement la Marine nationale à laquelle ils appartiennent. De Paris à Tahiti, ils défendront les couleurs de la France aux Jeux de la xxxiiie olympiade du 26 juillet au 11 août 2024. Grâce au centre national des sports de la défense, le tandem armées-fédérations participe à l’effort national.

L’armée de champions
Il était une fois... le bataillon de Joinville
Onze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, une unité de l’infanterie baptisée « Bataillon de Joinville » voit le jour dans l’ancienne École normale militaire de gymnastique de Joinville-le-Pont. Ce n’est pas anodin. La France qui a pris en 1948 la tête du conseil international du sport militaire (CISM) prône le sport comme ferment de paix.

Alors que la plupart des jeunes Français sont tenues de faire leur service militaire, l’unité propose aux meilleurs athlètes du pays, dès 1956, de poursuivre leur entraînement sportif dans un cadre militaire. Les fédérations sportives y voient un fantastique tremplin pour leurs futurs champions. Tout en remplissant leurs obligations militaires, les jeunes sportifs bénéficient de conditions optimales (encadrement technique de qualité, entraîneurs civils performants, cadres militaires qualifiés et émulation avec la présence des meilleurs athlètes). À partir de 1967, le bataillon se délocalise au sein de l’École interarmées des sports de Fontainebleau sur le camp Guynemer. 54 fédérations délégataires y envoient de 450 à 550 jeunes athlètes.
Une pépinière de champions
Les champions passés par le bataillon de Joinville sont légions : le cycliste Jacques Anquetil, le footballeur Michel Platini, le vainqueur de Roland Garros Yannick Noah, le lutteur Ghani Yalouz, le judoka David Douillet, l’escrimeur Jean-François Lamour ou encore le perchiste Jean Galfione.
En 2002, fin de la conscription : fin de l’histoire ? L’idée avait trop de qualités pour ne pas survivre. Douze ans plus tard, le Bataillon renaît de ses cendres sous une appellation modernisée et sans équivoque : l’armée de Champions. Officiellement École interarmées des sports, elle chapeaute alors 118 athlètes valides et 15 para sportifs, dans 21 disciplines. Elle est divisée en deux compagnies : d’un côté, les disciplines estivales regroupant 22 fédérations sportives au sein de l’École interarmées des sports, de l’autre les disciplines hivernales au sein de l’équipe de France militaire de ski. Sous contrat avec les armées, ils dépendent du centre national des sports de la défense (CNSD), sorte de Prytanée sportif, à la fois siège administratif et lieu de rencontres ouverts sur l’Agora représentée par la « Place d’armes des Joinvillais » du camp Guynemer de Fontainebleau.
En 2019, deux ans après que Paris a officiellement obtenu l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, le CNSD signe un protocole de soutien à l’événement. Ce protocole voit plus loin que les Jeux, il entend poser les jalons d’une collaboration étroite, dans la durée, entre les ministères des Armées et de l’Intérieur (gendarmerie nationale) et le mouvement sportif. L’État s’engage à soutenir l’innovation dans les secteurs de la recherche, du développement et du handicap en particulier.
Un palmarès élogieux
Depuis la création du bataillon, les 20 500 athlètes du contingent ont rapporté 45 médailles olympiques, 312 titres mondiaux civils ou militaires et 952 titres nationaux ou internationaux. Ce palmarès fait de lui un fabuleux ambassadeur de la France aux quatre coins du monde, dans la francophonie et au delà. En 2024, ce sont plus de 220 sportifs de haut niveau qui se sont engagés, parmi lesquels le maître Charline Picon (Marine nationale) avec une cinquième participation aux JOP de cette année, les nageurs Alain Bernard et Hugues Dubosc (gendarmerie nationale), Martin Fourcade (biathlon, armée de Terre), ou encore la double médaillée olympique Clarisse Agbegnenou (gendarmerie nationale). La dynamique lancée il y a près de 65 ans n’est pas prête de s’essouffler.
Dans le sillage du…
Commandant Erwan Lebrun, chef du bataillon de Joinville
Cols bleus :En quoi consiste votre rôle à la tête du bataillon de Joinville ?
Commandant Erwan Lebrun : Il est proche de celui d’un commandant d’unité. Je commande les sportifs de haut niveau de la défense (SHND), d’un point de vue administratif, et je dois leur fournir une formation militaire adaptée, sur la phase d’incorporation et tout au long de leur engagement.
C. B. :Quels sont les prérequis pour ce poste ?
CDT E. L. : Connaître le sport militaire et le mouvement sportif français pour naviguer d’une sphère à l’autre. Nous devons faire comprendre au sportif qu’il est militaire, et aux militaires que les sportifs sont en quête de performance et doivent tout mettre en œuvre pour y parvenir. Lors des Jeux, la planification d’entraînement est très fine. La moindre sollicitation extérieure peut perturber la performance, à l’instar d’un soldat qui se prépare à aller en opération militaire. Leur métier, comme celui du militaire, est d’être prêt physiquement pour être performant sur leur mission : la compétition.
C. B. : Comment préparez-vous cette armée de Champions ?
CDT E. L. : Le bataillon de Joinville ne les prépare pas physiquement, ce n’est pas notre mission. Nous sommes là pour les accompagner, travailler sur l’entraide, l’esprit d’équipage, le dépassement de soi. Pendant nos stages de formation militaire, nous les mettons dans une situation parfois inconfortable pour qu’ils réussissent à transposer leurs qualités lorsqu’ils en auront besoin. L’objectif est de les sortir de leur zone de confort, en jouant sur la qualité d’hébergement, le rythme, le sommeil, l’alimentation.
C. B. : Quelles disciplines allez-vous suivre pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques ?
CDT E. L. : Dans le cadre de ma mission, je vais suivre bien entendu l’ensemble des sportifs de haut niveau. D’un point de vue plus personnel, en tant que judoka et directeur des équipes de France militaires de judo, j’aurai forcément un regard attentif sur cette discipline qui reste mon sport de prédilection !
Gardiens de la flamme
Sécuriser le symbole des Jeux
Leur présence est inséparable de la flamme olympique. Parmi une centaine de gardiens sélectionnés pour cette mission (armées, police nationale, gendarmerie nationale et sécurité civile) trois appartiennent à la Marine nationale : les premiers maîtres Erwan et Nicolas et le second maître François assurent la sécurité et l’intégrité de la flamme sur différents tronçons du parcours. Chargés de recharger les lanternes, ils soutiennent surtout les différents porteurs de flamme lors du relais. Des hommes de l’ombre.
Leur mission a débuté au stade panathénaïque d’Athènes, lors de la cérémonie de passation de la flamme olympique de la Grèce à la France, le 26 avril 2024. Le lendemain, les gardiens embarquent avec la flamme, qui devient la 65e passagère du Belem. Direction Marseille. Durant la traversée, le premier maître (PM) Erwan et le second maître (SM) François sont aux petits soins du feu sacré. Toutes les huit heures, ils se relaient pour lui « donner le biberon, non pas à base de lait, mais de 50 millilitres de paraffine liquide ». Afin d’éviter qu’elle ne s’éteigne ou ne provoque des incendies à bord, elle est conservée dans une lanterne dont le modèle souffle sa trentième bougie cette année. Celle-ci est équipée d’un filtre à particules à nettoyer régulièrement, en plus de la suie qui s’accumule sur les vitres. Sa mèche doit, quant à elle, être changée tous les quinze jours. Émettant une chaleur pouvant atteindre 60° C, la lanterne est transportée dans une boîte en plexiglas dotée d’une poignée en plastique. Plutôt que de la conserver en permanence dans la même pièce, les gardiens de la flamme l’ont déplacée un peu partout sur le Belem : « Nous voulions rendre accessible l’image de la flamme, permettre à l’équipage de la voir au quotidien et de prendre des photos avec », explique le SM François. Le feu sacré a donc exploré les cuisines, découvert l’atelier du charpentier avant de grimper au sommet du mât. Entre deux promenades de leur protégée, les marins s’impliquent aussi dans la vie à bord. Tous deux moniteurs EPMS (entraînement physique militaire et sportif), ils ont organisé des séances sportives chaque après-midi rassemblant aussi bien les membres de l’équipage, les 16 jeunes du programme d’insertion de la Caisse d’Épargne que les journalistes embarqués. Une fois arrivés à Marseille le 8 mai, les gardiens relatent lors de leur RETEX (retour d’expérience) les difficultés rencontrées dans l’entretien quotidien de la flamme. Un document précieux qui servira à leurs successeurs sur les prochains tronçons, comme le PM Nicolas.
Un dispositif sécuritaire sur mesure
5e dan de karaté, ce chef de secteur au centre du service militaire volontaire de Brest a d’abord été gardien de la flamme entre Poitiers et Brest du 25 mai au 7 juin et le sera de nouveau entre Lille et Paris du 2 au 26 juillet. Avec le PM Erwan et le SM François, il fait partie des 17 militaires sélectionnés pour ce rôle en 2023 en raison de leur engagement sportif aussi bien dans la vie civile que militaire. Les gardiens ont ensuite suivi en novembre un séminaire au comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques sur leurs rôles dans le dispositif des convois escortant les porteurs de la flamme. « La plus importante formation a eu lieu en mars 2024 à Troyes pendant une semaine. Nous avons simulé un parcours de la flamme passant par Nogent-sur-Seine et Romilly avec l’ensemble du convoi composé des porteurs de flamme, de bus, de véhicules de gendarmerie et de CRS. » Dans ce dispositif, un gardien se tient en permanence aux côtés du porteur pour réagir à une éventuelle chute ou un malaise de ce dernier. Si la torche olympique venait à s’éteindre, un second gardien est présent à proximité avec une lanterne de secours contenant elle aussi le feu sacré afin de la rallumer. Les gardiens de la flamme jouent donc un rôle vital dans la préservation du symbole des Jeux jusqu’à sa destination finale à Paris, le 26 juillet. Elle servira alors à allumer la vasque olympique qui illuminera la Ville lumière pour la durée des épreuves.

Johanne Defay surfeuse
Portraits de champions
Ils sont treize. Treize sportifs de haut niveau, du judo à la voile, du kitesurf au canoë (ici, la céiste Eugénie Dorange, à Toulon avec l’équipage de la FREMM Alsace, le 18 juin dernier), représentant fièrement la Marine nationale à laquelle ils appartiennent.
Maître Charline Picon (49er FX)
La championne se réinvente
L’or à Rio, l’argent à Tokyo, les jeux de Paris sont riches de promesses pour Charline Picon. Enfant, elle commence la planche à voile en 1995 à la Tremblade où les odeurs d’iode se mêlent à celle des pins. Depuis, la véliplanchiste a (tout) raflé : un titre mondial en 2014, cinq titres européens entre 2013 et 2021 et deux podiums olympiques en 2016 et en 2021. Cet été, elle revient avec un nouveau défi : l’athlète change de discipline pour concourir dans la catégorie de dériveur 49er FX, où elle sera en binôme avec Sarah Steyaert. Pas question de se reposer sur ses lauriers, le challenge est de taille pour cette quatrième participation olympique !
Cols bleus : Participer aux Jeux Olympiques en France, dans votre pays, était-ce un rêve pour vous ?
Charline Picon : Vivre les jeux à la maison a fortement pesé dans la balance après Tokyo. Les jeux en France c’est une opportunité unique dans la carrière d’un athlète. Donc oui un rêve, et il fallait monter un projet pour pouvoir le vivre.
C. B. : Le 49er FX est une discipline en équipage, jusqu’ici votre sport était la planche à voile. Le fait d’être deux, représente- t-il un challenge supplémentaire ?
C. P. : C’est clairement le plus gros challenge : apprendre à communiquer, puis communiquer efficacement.
C. B. : Avez-vous eu l’impression d’apprendre un nouveau sport ?
C. P. : Oui complètement ! Le vent, les parcours restent identiques mais techniquement c’est un autre sport, même les noms des bouts sont différents.
C. B. : Depuis quand et comment vous préparez-vous pour ces JO ?
C. P. : En septembre 2021, j’ai contacté Sarah Steyaert pour voir si elle était d’accord pour sortir de sa retraite sportive et partir sur ce projet fou. Après un premier test on a signé. Il a fallu d’abord apprendre la technique de ce bateau très exigeant par son instabilité puis apprendre à naviguer à deux et à communiquer. Il y a aussi toute la partie matelotage, la préparation physique et la préparation mentale.
C. B. : Quels sont les points forts de votre binôme ?
C. P. : L’expérience et la complémentarité.
C. B. : Quels sont vos liens avec la Marine nationale ?
C. P. : Je suis entrée dans l’armée de Champions en septembre 2013. Ça m’a permis d’être à plein temps dans ma préparation olympique et d’avancer sereinement. Les stages d’acculturation militaire nous sont proposés plusieurs fois par an, afin de créer une cohésion entre athlètes de différents sports, rencontrer le monde militaire, et créer des liens. Ça reste de sacrées expériences ces stages, on va s’en souvenir longtemps !
C. B. : Quel sera votre prochain défi après les JO ?
C. P. : Apprendre à naviguer sur un plus gros bateau ! Je pars en famille autour du Pacifique sur un catamaran. Encore une sortie de ma zone de confort car je n’ai jamais navigué sur un tel bateau, mais j’ai besoin d’un beau projet pour prendre une grande inspiration auprès de ma fille et mon conjoint. En rejoignant une association environnementale, je veux rendre ce projet utile et peut-être en produire un film.

Matelot Joan-Benjamin Gaba (Judo - 73kg)
« Déterminé, motivé et honoré »
Jeune recrue de l’armée de Champions, Joan-Benjamin Gaba est entré dans la Marine en octobre 2023. Pour canaliser son énergie débordante, ses parents l’inscrivent au judo à six ans. Déjà familier des terrains de football et de rugby, il se découvre une passion pour cet art martial japonais. Ses points forts sur le tatami ? Son physique, sa puissance, son cardio et sa capacité à attaquer aussi bien à droite qu’à gauche. Champion de France des moins de 73 kilos, il portera avec fierté son kimono bleu aux Jeux Olympiques de Paris 2024.
Cols bleus : Avez-vous conscience de votre chance de participer aux Jeux Olympiques en France, dans votre pays ?
Joan-Benjamin Gaba : Ça n’arrivera plus c’est certain. Les étoiles sont alignées, c’est assez improbable que ça tombe sur notre génération. On va essayer d’en profiter au maximum et de puiser dans la force que les Français nous enverront pour faire la meilleure performance possible.
C. B. : Comment se déroule une journée- type d’entraînement pour les Jeux Olympiques ?
J-B. G. : On s’entraîne tous les jours du lundi au vendredi et parfois le samedi. Le matin c’est préparation physique, on alterne entre séances de cardio et de musculation. L’après-midi c’est judo, on commence avec la technique et ensuite il y a entraînement, puis combats et confrontations. Je me confronte à des judokas de ma catégorie n’ayant pas été sélectionnés pour les JO, mais le niveau des athlètes français est bon, ce sont donc des partenaires de qualité.
C. B. : Trois mots pour décrire votre état d’esprit ?
J-B. G. : Déterminé, motivé et honoré.
C. B. : Pour ces Jeux Olympiques, quels sont vos objectifs de médaille ?
J-B. G. : C’est un sport de combat, donc on a tous une mentalité de conquérant, on veut tous gagner, c’est évident. Si on vise le bronze, c’est certain qu’on n’aura pas l’or, donc je vise la médaille d’or.
C. B. : Quel sera votre prochain défi après les JO ?
J-B. G. : Être champion du monde 2025.

Quartier maître Axel Mazella (Kite Foil)
Entre ciel et mer
C’est une consécration pour les amateurs de kitesurf du monde entier. Cet été à Marseille, ce sport fait son entrée aux JOP. Pratiquée par une poignée de passionnés dans les années 90, cette discipline sportive s’est progressivement popularisée et professionnalisée. À l’image du kitesurf, ce qui était au départ un simple loisir pour Axel Mazella a bien vite mué en une soif de compétition. Âgé de 26 ans, le Toulonnais est aujourd’hui déterminé à marquer l’histoire de ce sport.
Cols bleus : Comment décririez-vous les sensations du kite foil?
Axel Mazella : Notre planche est à un mètre au-dessus de l’eau grâce à l’aileron attaché en dessous. On a vraiment la sensation de voler, d’être en apesanteur.
C. B. : Comment avez-vous été sélectionné pour les JOP ?
A. M. : Nous avons été sélectionnés par la Fédération française de voile qui s’est basée sur nos performances de la saison dernière. J’ai été le Français le mieux classé sur les quatre épreuves internationales, dont les championnats d’Europe où je suis arrivé premier.
C. B. : Comment appréhendez-vous les JO ?
A. M. : Je prends les choses étape par étape. Aujourd’hui je ne pense pas aux JO mais à ma préparation physique.
C. B. : Qu’avez-vous ressenti en portant la flamme à Toulon ?
A. M. : Beaucoup d’émotion, car il s’agit de ma ville natale et tous mes proches étaient présents. De nombreuses personnes m’ont aussi encouragé, pris des photos voire ont couru à mes côtés sur les 200 mètres de mon tronçon. C’était très beau, qu’une simple flamme provoque autant d’émulation.
Quartier-maître Hélène Noesmoen (planche à voile IQFoil)
Une aventure familiale
La planche à voile était un jeu. Quand Hélène Noesmoen a débuté, elle s’amusait sur l’eau avec ses frères et sœurs. Aujourd’hui, championne du monde (2020) et triple championne d’Europe en IQFoil, la sportive est toujours accompagnée par son frère Pierre, devenu son entraîneur. Elle rejoint l’armée de Champions en 2021 et devient marraine du sous-marin nucléaire lanceur d’engins Le Triomphant. Cette intégration dans la Marine et le soutien du CNSD lui ont permis de mettre son travail d’ingénieur sur pause afin de se concentrer sur l’IQFoil.
Cols bleus : Comment avez-vous vécu le passage de planche à voile à l’IQFoil?
Hélène Noesmoen : Au début, j’ai dû tout réapprendre, me remettre dans la peau d’un débutant. Je trouvais ça génial, car dans le sport de haut niveau, on est vraiment appliqué tous les jours à s’entraîner et progresser sur des détails. Avec le passage au foil, la marge de progression est devenue énorme. Seul le foil est en contact avec l’eau, il y a un équilibre plus fin à trouver, au début on commet beaucoup d’erreurs d’appui, ce qui provoque de grosses chutes.
C. B. : Qui sont vos partenaires d’entraînement pour la préparation des Jeux ?
H. N. : Je suis dans un sport individuel mais autour de moi, j’ai une équipe super soudée, c’est une préparation collective. Les partenaires d’entraînement sont comme des concurrents d’entraînement et permettent d’élever le niveau de jeu. Ceux n’ayant pas été sélectionnés pour les Jeux ont accepté de m’aider à repousser mes limites et à élever mon niveau pour être prête. Eux aussi sont là pour ramener la médaille à la France car la voile est un sport de partage.
C. B. : Quels sont vos points forts pour ces Jeux ?
H. N. : La capacité d’adaptation est ma plus grande force. À Marseille, c’est encore plus vrai parce qu’en Méditerranée la météo évolue très vite avec de petits effets de vent liés à la chaleur. L’été sur ce plan d’eau, d’une heure à l’autre ça peut changer beaucoup, la clef sera de s’adapter.

Quartier-maître Nicolas Goyard
« J’ai grandi avec la mer »
À bord du catamaran familial, un petit garçon de deux ans embarque pour une transatlantique. 26 ans plus tard, Nicolas Goyard n’a rien oublié de son enfance sur l’eau. Désormais, c’est sur sa planche équipée d’un foil, qu’il survole la mer. Intéressé par tous les aspects de son sport, il développe des foils et dessine ses propres planches. L’entrée de l’IQFoil * comme nouveau format de planche à voile, lui permet de gagner sa place pour les Jeux Olympiques. Cet été, à Marseille, Nicolas Goyard compte bien décrocher une médaille (en plein vol) !
Cols bleus : Quand et où avez-vous commencé à pratiquer la voile ?
Nicolas Goyard : La voile me suit depuis très longtemps, j’ai grandi avec la mer, c’est mon élément. J’ai vécu sur le bateau de mes parents jusqu’à mes dix-huit ans. Depuis tout jeune, j’ai appris à sentir le vent, les vagues, à barrer le bateau, donc toutes les sensations je les avais déjà. En Nouvelle-Calédonie, j’ai commencé l’Optimist à six ans, et la planche à voile à neuf ans.
C. B. : Quelles sont les sensations éprouvées en planche à voile à foil ?
N. G. : La liberté est forte, avec la vitesse il y a de l’adrénaline, c’est un sport de glisse. Derrière, on a une sensation de contrôle qu’il faut garder, toujours sur le fil de rasoir, à pousser la chose au maximum malgré l’instabilité. Et la connexion avec la nature est juste magique, on vole au-dessus de l’eau, on a l’impression d’être sur un tapis volant.
C. B. : Quels sont vos points forts pour les JO ?
N. G. : L’expérience car le nombre d’heures passées sur le foil me donnent un avantage sensoriel, ma capacité d’autoanalyse, mon endurance musculaire, et enfin ma vitesse.
C. B. : Quels sont vos liens avec la Marine nationale ?
N. G. : C’est une fierté d’avoir rejoint l’armée de Champions en octobre 2021. Le statut de sportif de haut niveau est souvent bancal et cette structure nous apporte justement une vraie stabilité. Je suis le parrain du Suffren, j’ai pu visiter le sous-marin et rencontrer l’équipage. C’était une riche expérience avec de très beaux échanges entre marins.
* Sur ce support, la dérive est remplacée par un foil surélevant la planche hors de l’eau en vitesse de planage

Quartier-maître Nicolas Goyard
Second maître Shirine Boukli (Judo – 48kg)
« Petite mais déterminée »
Le judo est une histoire de famille. Sous les regards avisés de son père et de son oncle, tous deux anciens judokas, Shirine Boukli pratique ce sport de combat depuis l’âge de quatre ans. Elle a d’ailleurs débuté dans le club de son oncle dans le Gard. Ceinture noire à 15 ans, elle combat aujourd’hui dans la catégorie des moins de 48 kg. En 2021, elle participe aux Jeux de Tokyo mais la jeune femme est éliminée dès le premier tour. Trois ans plus tard, plus déterminée que jamais, elle arrive pour Paris 2024, avec en poche un double titre de championne d’Europe et celui de vice-championne du monde.
Cols bleus : Vous êtes la marraine du porte-hélicoptères amphibieDixmude, qu’est-ce que cela représente ?
Shirine Boukli : Quand on m’a annoncé que j’étais marraine du Dixmude, j’avais du mal à y croire. Je suis Shirine, une judoka dans les – 48 kg et je deviens marraine d’un énorme navire de guerre ! Je suis très fière et j’espère rendre fier l’équipage le 27 juillet. Je devrais les rencontrer en septembre.
CB: Quels sont vos points forts ?
S. B. : Ma capacité à varier mon judo, mon expérience et ma détermination. J’ai beaucoup travaillé sur le ne-waza (le sol) et des choses plus précises pas toujours visibles, mais qui apportent des opportunités.
CB : Quelles sont les sensations éprouvées lors d’un combat ?
S. B. : C’est une montée d’adrénaline immédiate, et il faut s’adapter en permanence à son partenaire pour réussir à trouver l’ouverture pour une attaque.
CB : Quel appui vous apporte l’armée de Champions ?
S. B. : C’est un soutien depuis 2021 qui me garantit une stabilité financière. Le commandement est toujours à notre écoute dans les bons moments comme dans les plus difficiles. Avec les autres sportifs, on forme aussi une vrai « team de champions », on se soutient, on s’encourage.

Matelot Johanne Defay (surf)
La numéro 1 française
Historiquement, jamais une Française n’avait atteint ce classement mondial. La numéro 1 en France occupe la 2e place du podium international. Née au Puy-en-Velay en 1993, cette Réunionnaise d’adoption est la première surfeuse à intégrer l’armée de Champions. Marraine de la base navale de Port des Galets à la Réunion, elle peut compter sur le soutien très enthousiaste et créatif des marins* d’Outre-mer. Une chance de médaille très forte.
Cols bleus : Qu’ont de spécial ces Jeux ?
Matelot Johanne Defay : Je n’ai participé qu’aux Jeux de Tokyo, et il y avait le Covid, c’était un peu bizarre. Alors je mesure la chance que j’ai de vivre des JO dans mon pays : c’est incroyable !
C. B. : Qui sont vos principales concurrentes ?
J. D. : L’Américaine Caity Simmers, numéro 1 mondiale, et l’Australienne Molly Picklum, sur la troisième place du podium. En France, la deuxième qualifiée au JO est la Tahitienne Vahine Fierro. Sur le circuit pro, elle est en deuxième division ; en revanche aux JO, elle est une grande locale de la vague mythique de Teahupo’o où vont se dérouler les épreuves, elle sera clairement une des filles à battre !
C. B. : Quel spot vous plaît le plus ?
J. D. : Ça dépend des humeurs ! Il y a autant de vagues différentes que de jours, c’est ce qui rend cette pratique si spéciale. J’adore les longues droites puissantes comme JBay, en Afrique du Sud. J’ai commencé à 7 ans, et j’ai tout de suite accroché ! Même, en jouant dans les vagues à la nage ou en bodyboard.
C. B. : Comment vous entraînez-vous ?
J. D. : J’ai deux routines. à la Réunion, on essaye de faire un entraînement surf le matin, puis en fonction des conditions, en fin de journée je fais de la musculation, de la course à pied et du vélo pour l’endurance fondamentale, du yoga pour le flow, des étirements, du skate. Je fais deux entraînements par jour voire trois. Avec mon mari qui est aussi mon préparateur physique, on travaille beaucoup le mental et le physique de front car c’est indissociable. En compétition, ou en déplacement - 8 à 9 mois par an – je m’adapte mais toujours avec beaucoup de surf au programme.
C. B. : Connaissez-vous les autres sportifs de l’armée de Champions ?
J. D. : Oui bien sûr, c’est aussi pour cela que j’adore en faire partie. Je rencontre d’autres sportifs, d’autres carrières, d’autres chemins de vie, et c’est très inspirant en tant qu’athlète.

Johanne Defay surfeuse
Second maître Jean-Baptiste Bernaz (Voile ILCA 7)
Réaliser un rêve d’enfant
De Pékin à Tokyo, en passant par Londres et Rio, Jean-Baptiste Bernaz est un vétéran des Jeux Olympiques. Médaille d’or à la Coupe du monde de voile 2017 et champion du monde d’ILCA7, le Provençal de 36 ans est parrain du Pôle École Méditerranée et se prépare désormais pour les JOP.
Cols bleus :Qu’est-ce qui vous a poussé à faire de la voile en compétition ?
Jean-Baptiste Bernaz : J’étais avec mon père chez David Ginola qui nous avait invités pour regarder la Coupe de l’America. Cela m’a immédiatement fait rêver, je devais avoir 8 ans ! Je me suis tourné vers mon père et je lui ai demandé comment embarquer sur ce type de voilier. Sa réponse a été simple : « À bord de ces bateaux-là, il y a plein de champions du monde ou de médaillés olympiques en Laser* donc si tu veux prendre part à ces courses, deviens l’un d’entre eux ». Ça a été le déclic pour moi.
C. B. :Où se déroulera l’épreuve olympique ?
J.-B. B. : Dans la rade sud de Marseille. Pour ma catégorie, l’ILCA 7, les courses auront lieu deux fois par jour du 1er au 5 août. À l’issue de ces dernières, les 10 premiers du classement général seront qualifiés pour la Medal Race qui se tiendra le 6 août devant la Marina olympique du Roucas-Blanc. Les points de cette ultime course compteront double donc il faudra certainement performer pour remporter une médaille.
C. B. : Comment appréhendez-vous cette édition des JO en France ?
J.-B. B. : Avec beaucoup d’envie et de motivation, grâce à toute l’énergie glanée auprès de ma famille et de mes amis. Ce seront peut-être mes derniers JO donc je ne veux rien regretter jusqu’à la fin.
* Ancien nom de l’ILCA7 jusqu’en 2021

Jean-Baptiste Bernaz évolue en voile ILCA 7
Second maître Marc-Antoine Olivier (Nage en eau libre)
Une belle entrée en Seine
Premier nageur de l’armée de Champions à avoir rejoint la Marine, Marc-Antoine Olivier plongera, cet été, dans les eaux de la Seine pour une course de dix kilomètres. À vingt ans, le nageur en eau libre remportait la médaille de bronze aux Jeux de Rio. Huit ans plus tard, il est vice-champion du monde. Cette fois, les Jeux sont à domicile. Marc-Antoine Olivier espère monter sur la plus haute marche du podium.
Cols bleus :Comment vous entraînez-vous pour les Jeux Olympiques ?
Marc-Antoine Olivier : Je m’entraîne à Ostia en Italie depuis les Jeux de Tokyo. Chaque semaine, on fait huit entraînements en bassin et deux en mer. Je suis dans un groupe avec quatre de mes plus gros concurrents. Ce n’est pas évident au quotidien parce que ça demande de l’exigence tous les jours, mais pour notre discipline c’est important. J’ai aussi pas mal de compétitions jusqu’aux Jeux, qui me permettent de gagner en expérience pour la course de cet été.
C. B. :Pour la nage en eau libre, plutôt eau douce ou eau salée ?
M.-A. O. : J’aime bien la mer, avec le sel on est porté, c’est plus facile, sauf quand la mer est très agitée. Une mer sans vagues, c’est idéal.
C. B. :La qualité de l’eau de la Seine a fait couler beaucoup d’encre, qu’en pensez-vous ?
M.-A. O. : Ce sont mes troisièmes Jeux, à chaque fois la qualité de l’eau est remise en question. Il n’y a jamais eu de problèmes, les organisateurs ont toujours su répondre présents. J’ai déjà fait des coupes du monde en Amérique du Sud, où les eaux étaient bien pires que celle de la Seine.
C. B. :Quel est votre meilleur souvenir avec la Marine ?
M.-A. O. : Les championnats de France militaires en 2018, il y avait une ambiance incroyable et j’ai pu découvrir un univers que nous, athlètes de haut niveau, n’avons pas l’habitude de côtoyer. J’ai pu rencontrer des marins du Charles de Gaulle qui repartaient en mission juste après, c’était vraiment sympa de discuter avec tout le monde.
Marc-Antoine Oliver nage en eau libre
Matelot Eugénie Dorange (Canoë)
Un sourire à toutes épreuves
Après la danse, l’équitation, le ski, Eugénie Dorange souhaite faire de l’aviron comme ses cousins. À Auxerre, pas d’aviron, mais avec sa sœur, elle débute le kayak à 8 ans puis le canoë trois ans plus tard, sport asymétrique et exigeant. Qualifiée pour ses premiers Jeux à 25 ans, elle s’entraîne plus de quinze fois par semaine sur l’eau, ce qui ne l’empêche pas de se préparer à passer le concours du barreau en septembre. Elle a rejoint l’armée de Champions en 2023 et devient marraine de la frégate Alsace.
Cols bleus :Pourquoi avez-vous fait cette bascule du kayak vers le canoë ?
Eugénie Dorange : Avant les femmes n’avaient pas le droit de faire du canoë car soi-disant cela déformait le bassin. La première compétition internationale date de 2009 aux championnats du monde et le canoë féminin intègre les Jeux seulement à Tokyo, en 2021. En club, j’ai eu la chance de rencontrer les premières Françaises sélectionnées en « canoë dames ». Cela m’a montré que des filles pouvaient aussi pratiquer cette discipline.
C. B. :Vous attendiez-vous à être sélectionnée ?
E. D. : Sur le papier, ça fait quelques années que je suis la meilleure française, et il fallait assurer cette année encore pour être qualifiée. C’était un objectif dans mes cordes, mais une sélection olympique n’est jamais gagnée d’avance et implique énormément de stress. Aujourd’hui, je suis qualifiée en monoplace mais j’ai une petite déception de ne pas m’être qualifiée en biplace parce que c’était notre objectif avec mon équipière.
C. B. : Dans quel état d’esprit êtes-vous à l’approche de cette compétition ?
E. D. : La distance est différente entre le biplace et le monoplace. Toute l’année, je me suis préparée sur du 500 mètres, en équipage. Là, la préparation change car je vais courir 200 mètres en monoplace. Tous les jours comptent, chaque séance, chaque coup de pagaie doit être optimisé pour progresser et être performante aux Jeux. Mon objectif est de faire descendre mon chrono au maximum pour être compétitive. Une fois au Jeux, tout est possible.

Matelot Eugénie Dorange évolue en canoë
Quartier-maître Jérémie Mion (Voile 470)
Se défier au quotidien
De la voile en Île-de-France. Ce n’est pas courant, pourtant, c’est à Cergy-Pontoise, à l’âge de 11 ans que Jérémie Mion a découvert cette discipline. Champion du monde en 2018, trois fois champion d’Europe, troisième de la transat Jacques Vabre en 2021, cet éternel optimiste aime la connexion avec la nature, la mer, le vent, ce sentiment d’évasion. Aux Jeux de Paris 2024, il concourt en 470 au côté de Camille Lecointre.
Cols bleus :Quelle est la spécificité du 470 ?
Jérémie Mion : Le 470 est un dériveur de 4m70 de long. Il y a trois voiles : une grand-voile, un foc et un spinnaker. Jusqu’à présent, les équipes n’étaient pas mixtes, donc j’ai déjà fait les jeux de Rio et Tokyo avec Sofiane Bouvet et Kévin Peponnet. Depuis cette olympiade, c’est devenu mixte donc on s’est associé avec Camille il y a presque deux ans. Je suis équipier et Camille est barreuse.
C. B. :Quel sera votre objectif ?
J. M. : On vise l’or, comme cela si ça foire on aura le podium (rires). Je pense qu’on peut oser rêver de la médaille d’or mais on est lucide. Ce sport est soumis à la météo, ce n’est pas simple. Si on fait un podium on sera quand même très content. Avec Camille, on a décidé d’aller vite mais on a tous les deux une grosse expérience.
C. B. :Et votre prochain défi ?
J. M. : Retenter une olympiade si j’ai encore de l’énergie. Sur le court terme, j’ai dans l’idée de changer de support et de partir en 49er * avec Jean-Baptiste Bernaz et sur du long terme, j’aimerais retenter les courses au large.
C. B. :Pourquoi l’armée de Champions ?
J. M. : La voile est un sport peu médiatisé à l’origine. Ce n’est pas simple de vivre de notre sport. Être dans l’armée de Champions me permet de me concentrer sur mon sport avec une solde tous les mois. Nous partageons aussi des valeurs communes entre sportifs de haut niveau et marins : l’entraide, la persévérance, l’humilité. J’ai l’impression d’être rentré dans une grande famille qui nous épaule et compte sur nous.
* Classe de dériveur à deux équipiers de 4,99 mètres de long.

Second maître Hugo Boucheron (Aviron)
Force et endurance
Champion du monde (2016), champion d’Europe (2018) champion de France (2020) et champion olympique (2021). Hugo Boucheron peut s’enorgueillir d’un palmarès exceptionnel. Entré dans l’armée de Champions en 2018, ce rameur a d’abord pratiqué seul avant de ramer en duo puis à quatre et huit. Avec son coéquipier Matthieu Androdias, ils souhaitent décrocher la victoire devant leurs proches et faire résonner la Marseillaise sur les podiums.
Cols bleus :Quelles sont les sensations éprouvées lors d’une course ?
Hugo Boucheron : C’est une intense douleur (rires). L’aviron est un sport technique et physique. Le muscle est très sollicité avec une forte présence de lactates qui amènent une douleur dans l’effort. C’est vraiment un épuisement total et en même temps, il faut réussir à gérer son corps techniquement. Pour autant, on va chercher le plaisir dans la réussite de son geste pour aller au bout de l’effort avec son coéquipier et surtout passer la ligne en premier.
C. B. : Pour quelles raisons vous êtes- vous tourné vers le « deux de couple » ?
H. B. : Lors de sélections nationales individuelles aux championnats de France, nous nous sommes démarqués avec mon coéquipier, Matthieu Androdias. Le club a décidé de nous faire évoluer ensemble et notre duo a bien fonctionné. Depuis 2015, nous continuons en équipe.
C. B. : Comment avez-vous rejoint l’armée de Champions ?
H. B. : Je suis arrivé en équipe de France élite chez les seniors, en 2014. Je n’avais pas de sponsors et d’argent, donc j’étais entraîneur dans mon club à mi-temps et je m’entraînais en parallèle. Pour être capable de rivaliser contre la concurrence et les exigences internationales, il faut avoir beaucoup de temps pour pratiquer (en moyenne trois fois par jour). Je devais augmenter le rythme d’entraînement et de récupération. J’ai rejoint l’armée de Champions en 2018, et elle m’accompagne pleinement dans mon projet olympique. Et les résultats sont là ! J’ai remporté plusieurs titres internationaux. Un sportif doit pouvoir se concentrer à 100 % sur son sport et la Marine me permet de pouvoir faire cela toute l’année.

Matelot Emma Lombardi (Triathlon)
Trois sports en un
Elle n’a que 22 ans, mais nourrit déjà des ambitions de titre olympique. Membre de l’équipe féminine de triathlon, le matelot Emma est la plus jeune sportive de la Marine nationale à avoir été sélectionnée. Elle est aussi la marraine de la frégate de défense aérienne (FDA) Chevalier Paul.
Le sport a toujours fait partie de son quotidien, grâce à ses parents qui l’inscrivaient, elle et son frère, à une association sportive chaque année. Emma Lombardi a ainsi commencé la natation à l’âge de cinq ans avant de découvrir le triathlon quatre ans plus tard. Ce sport a la particularité de combiner la natation, le cyclisme et la course à pied. Encore lycéenne, elle se lance dans la compétition et connaît une ascension fulgurante. Championne du monde espoir en 2021 puis championne du monde en relais mixte l’année suivante, la triathlète iséroise est classée numéro 3 mondial en 2023. Elle-même ne s’y attendait pas : « Cela a été une surprise pour moi, j’avais pour objectif de courir avec les plus grandes, mais je ne pensais pas faire de telles performances ! Mais je pense que je dois encore travailler ma vitesse et mon explosivité. » *
Grâce à ses performances, elle fait partie des trois triathlètes féminines à avoir été sélectionnées pour représenter la France, cet été aux JOP. L’épreuve olympique aura lieu le 31 juillet et sera divisée en trois tronçons. La course commencera par 1500 m de natation dans la Seine, suivie de 40 km de cyclisme répartis en sept tours et se conclura par 10 km de course à pied. Le pont Alexandre-III sera le point de départ et la ligne d’arrivée. L’athlète participera aussi à la course en relais mixte prévue le 5 août.
* Source : Centre de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) Provence-Alpes-Côte d’Azur, ministère des Sports.

Matelot Emma Lombardi en triathlon
Des stages pour les blessés
Le sport, clé de la reconstruction
Chaque année, des marins, blessés ou malades, bénéficient de stages de reconstruction par le sport. Ces derniers de pratiquer une activité physique, créer du lien social et renouer avec l’Institution.
En plus d’un soutien et d’un accompagnement administratif, médical, social, juridique et humain, la CABAM propose depuis 2022 ses propres stages de réadaptation par le sport afin de motiver les malades et les blessés et d’enclencher leur processus de reconstruction. Il existe actuellement deux stages par an financés par l’association Entraide Marine 1 pouvant accueillir jusqu’à dix marins. Le second maître Pierre* en a lui aussi bénéficié. Après un accident de travail et un alitement de plusieurs mois, « cela m’a permis de rompre l’isolement et de recréer du lien avec la Marine. Si la CABAM ne m’avait pas contacté, je ne les aurais jamais connus. » L’activité sportive suscite la cohésion et des encouragements, sans porter de jugement. Elle place le blessé ou le malade dans une dynamique valorisante quelle que soit sa pathologie. « Le sport fait du bien au moral, souligne Clémence de Vitry, assistante sociale d’Entraide Marine. J’ai vu des marins qui ne se connaissaient pas se confier des choses très personnelles et garder contact des mois après. »
« Handicapables »
« On parle de reconstruction par le sport, mais il faut surtout voir les stages sportifs comme un premier jalon, une main tendue », admet Clémence de Vitry. « Une fois l’isolement terminé, c’est là que peuvent démarrer les démarches administratives, des envies professionnelles. C’est un premier pas dans la vie d’après. » Il existe ainsi une multitude de stages de reconstruction par le sport, organisés par le Centre National des Sports de la Défense (CNSD), le Cercle sportif de l’Institution nationale des Invalides (CSINI) ou la Cellule d’aide aux blessés de l’armée de Terre (CABAT) laquelle organise annuellement les Rencontres militaires blessures et sports (RMBS). Ces rencontres s’articulent autour d’activités physiques adaptées à chaque handicap et permettent aux blessés de l’ensemble des armées et services de retisser du lien social. C’est le cas du maître Corentin*, commando Marine, souffrant d’un stress post-traumatique. « J’avais fait part de mon envie à la CABAM de participer aux Invictus Games et ils m’ont proposé de commencer par un stage RMBS, où les rencontres sont primordiales. J’ai découvert plusieurs sports dont le rugby fauteuil. » Corentin a ensuite fait un stage multisports, plus intense et proche de la compétition.
L’objectif est de « montrer à chacun qu’il est capable, on parle alors d’handicapable. Ce sont des blessés, oui, mais en situation de handicap », explique le commandant Erwan Lebrun, ancien chef du dispositif de reconstruction par le sport pour les armées. C’est pourquoi chaque stage est ouvert à tous et s’adapte à l’ensemble des handicaps et pathologies. « J’ai en tête l’exemple d’anciens militaires qui, par le travail et la volonté, sont allés au-delà de leur handicap et de leurs blessures et sont aujourd’hui au sein du Bataillon de Joinville pour participer aux Jeux Paralympiques. »
D’autres stages sont également ouverts aux familles par le CNSD ou le CSINI, par exemple le stage d’équitation adaptée, qui permet de faire vivre aux blessés des expériences corporelles et émotionnelles avec le cheval. La famille, dont l’accompagnement reste indispensable dans le parcours de reconstruction du blessé, est également conviée. En 2025, un village des blessés devrait voir le jour au CNSD, dans une structure adaptée, capable d’accueillir une centaine de blessés et leurs familles.
EV1 Margaux Bronnec
* Prénoms modifiés
1 Vous voulez faire un don à Entraide Marine-Adosm ? Rendez-vous sur https://www.entraidemarine.org/adherer-et-faire-un-don-en-ligne
