Lieutenant de vaisseau Luc : atomicien et instructeur à bord de la mission Jeanne d’Arc
Publié le 30/04/2025
Il a la transmission des savoirs chevillée au corps. Le lieutenant de vaisseau (LV) Luc, expert en propulsion nucléaire, a aussi une âme de passeur et délivre ses connaissances aux jeunes générations de marins. Il vient d’embarquer pour sa 5e mission Jeanne d’Arc. Portrait d’un instructeur passionné.

La Corse, Djibouti, Tours, la Bretagne… Dès son plus jeune âge, Luc a vu du pays. Fils de militaire, il a voyagé au gré des affectations. « J’ai oscillé toute mon enfance entre l’attrait des armées et le rejet dû aux absences de mon père », se souvient le lieutenant de vaisseau. Adolescent, il pousse les portes d’un lycée militaire, entraîné par son désir de discipline et sa recherche d’esprit de groupe. En intégrant la classe préparatoire du Prytanée, il se voyait déjà à Saint-Cyr ou à Polytechnique. Jusqu’au jour où la Marine entre en scène pour diffuser son parfum d’embruns et séduire le jeune homme, grâce à son esprit d’équipage, sa technicité et sa promesse de voyage, « Cela m’a semblé bien plus proche de mes aspirations que ce que proposaient les autres armées », confie-t-il.
En 2013, Luc intègre l’École navale et opte pour la voie énergie – propulsion afin de se spécialiser dans le nucléaire. « Notre métier est de tout mettre en oeuvre pour que les autres puissent faire le leur, raconte-t-il avec passion. Réparer un moteur, on pourrait le faire dans le civil. En revanche, réparer un moteur qui sert à propulser une frégate ou conduire une centrale dans le but de catapulter des avions, c’est fascinant. »
Après deux affections embarquées et déjà trois missions Jeanne d’Arc au compteur, il rallie Cherbourg et son école atomique (EAMEA) pour étudier la gestion des risques et la conduite d’une chaufferie nucléaire. Vécues à la fois comme un marathon et un sprint, ces deux années à terre lui ont permis de devenir expert d’un domaine en pointe.
Chef de secteur au service extérieurs sur le Charles de Gaulle, le lieutenant de vaisseau met en place une formation pour les brevets d’aptitude technique (BAT), par validation des compétences acquises. Si l’aspect technique occupe une place prépondérante dans le quotidien des atomiciens, l’officier prouve par ce dispositif de compagnonnage que c’est bien l’humain qui est au coeur de ce métier. Grâce à cette initiative, trois matelots ont obtenu leur BAT mécanicien naval directement depuis le porte-avions, sans repasser par les bancs de l’école.

En 2023, il devient instructeur « énergie » au sein de l’École d’application des officiers de marine (EAOM). Chargé de la formation des ENERG, lors de la mission Jeanne d’Arc, Luc dispense des cours techniques sur les installations et leur conduite, sur la gestion des arrêts techniques ou sur la logistique. La mission est inspirante : « Voir les jeunes enseignes progresser au fur et à mesure des cours, des quarts, des exercices et surtout les voir se construire tout au long de la mission, est une belle motivation pour se lever le matin », explique t-il. « Je suis surtout fier quand je les retrouve sur leurs affectations, qu’ils m’expliquent ce qui leur sert, ce qui leur a manqué… Je peux ainsi adapter ce que j’enseigne aux plus jeunes ! »
L’EAOM offre un cadre privilégié pour un suivi personnalisé et pour créer un lien fort entre élèves et instructeurs. « Le retour de mission Jeanne d’Arc est toujours un moment émouvant, particulièrement quand on est instructeur ! Quand on voit les élèves pour la dernière fois à bord du PHA, il y a cette reconnaissance réciproque pour ce qu’on leur a appris et ce qu’ils nous ont apporté humainement », conclut Luc.

Focus : l'Ecole d'application des officiers de Marine
Créée en 1864, l’École d’application des officiers de Marine (EAOM) a célébré ses 160 ans l’année dernière. Véritable école embarquée, elle représente l’aboutissement du cursus de formation des officiers de Marine dans un cadre opérationnel, interarmées et interallié unique, faisant d’eux des officiers prêts à servir, à commander et à combattre.
Mon meilleur souvenir ?
« Le passage du cap Horn pendant la mission Jeanne d’Arc 2024 ! Pendant trois jours, nous avons navigué dans les chenaux de Patagonie, nous rapprochant ainsi des habitudes de la Marine d’antan qui découvrait sans cesse des lieux inconnus. Aujourd’hui, il est rare que des bateaux passent encore par ce cap mythique. La perspective de voyage, pour laquelle beaucoup s’engagent, me fait encore rêver aujourd’hui, alors que j’en suis à ma 5e Jeanne. »