Ils aiment Cols bleus...et ils le disent !
Publié le 05/03/2025

Commissaire en chef de première classe Gonzague Aizier, lauréat du du prix Éric Tabarly du meilleur livre de mer 2024 pour son roman Après la tourmente (Ura)
« Cols bleus, pour moi, ce sont d’abord les premiers numéros glanés çà et là, enfant puis adolescent, au hasard de brèves interactions avec la Marine : une journée portes ouvertes sur le porte-avions Charles de Gaulle alors en construction à Brest, un salon étudiant, une visite du musée de la Marine.
Plus tard, élève commissaire de la Marine à Toulon puis embarqué ou en état-major, je suis devenu un lecteur régulier appréciant, comme beaucoup, de parcourir le « dernier Cols bleus ». Un lecteur avec une préférence pour les brèves d’actualité, les pages culturelles et les magnifiques photographies. Cols bleus, ce sont aussi des reproductions de tableaux en 4e de couverture, utiles pour donner de l’âme à des bureaux de passage, les petites annonces aujourd’hui disparues de recherche de permutations entre marins, qu’un lecteur distrait aurait pu prendre pour la rubrique « rencontres » d’un magazine moins officiel, ou des interviews sur les carrières aux allures parfois de publi-communiqués. Reste aussi le souvenir des articles rédigés après une escale ou une activité de rayonnement, avec des effets appuyés, insistant par exemple sur le fameux lien armées-nation… Cols bleus, c’est comme avec la famille, on le prend tout entier, avec ses immenses qualités et une forme de tendresse pour ses défauts et ses biais.
Et puis, un jour de septembre 2023, je suis passé de l’autre côté du miroir. Pour une interview autour de mon premier livre. J’arrive stressé, tenaillé par un sentiment d’imposture. équipe attentive et professionnelle, questions ajustées d’une journaliste qui a lu et apprécié le livre. Je me détends et l’interview se fait sans heurts. Plus tard, j’ai eu de nouveau la chance d’être interviewé dans le cadre de la sélection du prix Encre Marine à Toulon, toujours avec compétence et bienveillance.
Merci à l’équipe de Cols bleus d’avoir été à mes côtés pour cette étape et surtout de continuer à nous faire embarquer et rêver. »
Philippe Brichaut, secrétaire de rédaction de Cols bleus
Aujourd’hui réserviste et instructeur au sein d’un centre de préparation militaire Marine, cet ancien marin est la « mémoire vivante » de Cols bleus. Il occupe le poste de secrétaire de rédaction du magazine depuis neuf ans.

Qu’est-ce qu’un secrétaire de rédaction ?
Philippe Brichaut : Il est l’interface entre l’éditeur, les différents contributeurs et l’imprimeur. Je suis aussi journaliste, j’écris des articles, réalise des reportages et des interviews.
Quand a débuté votre histoire dans la Marine ?
Ph. B. : Je me suis engagé en janvier 1990 comme matelot, j’ai principalement travaillé en ressources humaines, dans des unités à terre et embarquées, au sein d’état-major, des fusiliers marins à l’aéronautique navale.
Quand avez-vous découvert Cols bleus ?
Ph. B. : Lors de ma préparation militaire à Jeumont dans le Nord, où nos instructeurs nous le distribuaient religieusement.
Un numéro dont vous êtes très fier ?
Ph. B. : Celui sur le centenaire du premier conflit mondial. Le magazine a été écrit comme si on était en 1917. Et là, c’était une vraie course à l’échalote pour trouver des photos. À l’époque, il y avait beaucoup moins de photographes qu’aujourd’hui et la conservation était plus compliquée. C’est un numéro intemporel, qui sera toujours intéressant et utile dans dix ou quinze ans.
Un article qui vous a marqué ?
Ph. B. : Mon reportage en Belgique pour commémorer la bataille de Dixmude. C’était bien l’une des premières fois où je suis allé en reportage un peu plus loin que Paris.
Des articles très historiques !
Ph. B. : J’ai toujours aimé l’histoire, c’est un sujet qui m’intéresse. Plus simple à écrire mais les recherches sont plus importantes que pour un article classique ou une interview.
Un bon souvenir ?
Ph. B. : La première fois où j’ai eu ma « tronche » dans Cols bleus en 1995. C’était à l’occasion des championnats d’escrime de la Marine, je me suis retrouvé en photo dans la rubrique sport, avec mes camarades de l’équipe de Brest. Nous venions de remporter l’épreuve par équipe, et n’étions pas peu fiers d’être dans Cols bleus.
Comment avez-vous vécu ce passage de marin à secrétaire de rédaction ?
Ph. B. : Le point commun entre les deux, c’est la capacité d’adaptation. Un marin, surtout embarqué, doit effectuer des tâches éloignées de sa spécialité. J’étais RH mais sur toutes mes affectations embarquées, j’étais aussi barreur, pompier lourd ou léger, téléphoniste du directeur d’intervention, opérateur sonar sur chasseurs de mines et officier de quart aviation sur frégate de type La Fayette. Chaque marin doit s’adapter, sortir de sa zone de confort, apprendre des nouvelles choses. Alors, quand je suis arrivé à la rédaction, cette polyvalence enseignée par la Marine m’a servi à apprendre mon nouveau métier.
Quartier-maître Félix, guetteur sémaphorique
Dans le n°3121, Cols bleus avait dressé le portrait du quartier-maître Félix qui revient ici sur son expérience.

Un article qui vous a marqué ?
Quartier-maître Félix : Je venais de rentrer dans la Marine, et j’avais lu un article sur le rythme de vie des plongeurs-démineurs. J’avais trouvé ça super intéressant et ça m’avait poussé à me renseigner sur des spécialités que je ne connaissais pas.
Votre ressenti avant l’interview ?
QM. F. : J’étais très stressé parce que j’avais peur de ne pas trouver mes mots et ne pas réussir à mettre en forme mes idées. Comme c’est un métier auquel je tiens beaucoup et qui est assez méconnu, je n’avais pas envie de donner une mauvaise impression. Quand j’ai vu l’article paraitre, j’étais content car je pensais avoir donné une bonne image de la spécialité.
Quel souvenir garderez-vous de ce moment ?
QM. F. : C’était un moment vraiment sympathique, j’ai apprécié l’exercice. Cela faisait bientôt trois ans que j’étais dans la Marine et j’avançais sans trop me poser de question. Le fait de me forcer à revenir en arrière, à relire les expériences positives ou négatives que j’avais eu et faire un peu l’historique de ce que j’avais vécu m’a servi.
Une anecdote particulière ?
QM. F. : Pour illustrer l’article, des reporters images sont venus pour prendre des photos. C’est un exercice auquel je ne suis pas vraiment habitué, dans le privé je prends peu de photos. Je me souviens d’une scène où j’étais debout en uniforme sur un banc public, sur le petit sentier devant le sémaphore. Je devais croiser les bras et regarder vers la mer, c’était un peu lunaire comme situation, les passants passaient derrière moi étonnés, je me sentais un peu ridicule.
Comment ont réagi vos proches en découvrant l’article ?
QM. F. : Ils étaient assez fiers de voir que j’apparaissais dans un magazine, ça leur faisait bizarre mais oui, ils étaient contents et ils ont ri de cette pose dont je vous parlais. Dans l’article je parlais de mes collègues et la bonne expérience que j’avais eu à l’île de Batz. Je ne leur avais pas forcément dit, l’article leur a fait plaisir et ça a été l’occasion de partager ça.
Capitaine de vaisseau Jocelyn Delrieu, commandant du porte-hélicoptères Dixmude

« Aussi longtemps que je me souvienne, j’ai toujours aimé naviguer. Autour des bancs de sable qui parsèment l’entre terre et mer du pays où j’ai grandi. Cherchant à repousser un peu plus loin chaque année l’horizon. Nourri par des récits d’aventure récupérés çà et là : Jules Verne et son Nautilus, Adlard Coles face au gros temps, Moitessier et sa Longue Route, l’épopée des contre-torpilleurs du type Le Fantasque ou celle, héroïque, des sous-mariniers américains dans le Pacifique sous la plume d’Edward. L. Beach.
Puis vint une rencontre au Salon nautique de Paris avec deux marins ayant parfaitement réussi leur mission, et qui me laissèrent emporter les trois derniers Cols Bleus. C’en était fait : pas encore adolescent mais déjà abonné, l’un des plus jeunes peut-être ; pas encore un pied à bord mais l’impression de faire partie de l’équipage. Et lorsqu’aujourd’hui le dernier Cols Bleus arrive au carré du Dixmude, je le feuillette avec plaisir. J’y retrouve des camarades et des images comme seule la Marine sait en produire. Puis, je le laisse innocemment traîner : peut-être incitera-t-il d’autres jeunes à choisir cette vie de marin et à s’exempter ainsi de ce qui est prévisible. »