Comment la Marine affine ses moyens de lutte anti-drone

Publié le 29/04/2025

Auteur : Nathalie Six

l’automne 2024, la Marine a testé un brouilleur fabriqué par une entreprise française, pendantun exercice Wildfire. Exemple d’un test couronné de succès qui a donné lieu à un embarquement quasi immédiat sur frégate et un résultat opérationnel, illustrant l’efficacité de la démarche Perseus.

Moins de 60 jours ! C’est le temps écoulé entre les préparatifs du test et un résultat opérationnel, grâce au fructueux travail d’équipe entre la Marine (la Force d’action navale, le centre d'expertise des programmes navales et l’état-major de la Marine), la direction générale de l'Armement (centre d’essais du Levant) et l’industriel.  Il y a quelques mois, Cols bleus (n°3121 octobre 2024) évoquait le cas d’usage sur la frégate multi-missions Languedoc d’un système de boules optroniques, PASEO XLR. L’équipement a été intégré très rapidement après des essais concluants. Ces caméras nouvelle génération ont été conçues pour assurer l’identification de tout type de menace à très longue distance. Elles peuvent également être utilisées en conduite de tir pour l'artillerie de tout calibre.

Pour la Marine nationale, le besoin d’améliorer les capacités de lutte anti-drone est primordial car la menace est omniprésente, et pas seulement en mer Rouge. Récemment, plusieurs bâtiments français ont dû se défendre contre des munitions rodeuses, des drones capables de rester longtemps en mer ou en l’air jusqu’à ce qu’une cible leur soit désignée. Parfois c’est un bateau de pêche qui dissimule une charge explosive. Ce fut le cas dans le golfe d’Aden où la frégate de défense aérienne Chevalier Paul avait vu s’avancer vers elle une simple barque dronisée, chargée d’explosifs. Ce drone avait été neutralisé à la mitrailleuse.

Afin d’adapter ses moyens de lutte anti-drone, la Marine fait évoluer en permanence l’entraînement suivi par ses équipages.

Dans le domaine capacitaire, la Marine vient de donner une nouvelle preuve de réactivité. Il s’agit cette fois d’un système de brouillage. Après l’avoir d’abord testé lors d’un exercice Wildfire, le brouilleur mis au point par l’industriel a obtenu des résultats suffisamment probants pour être embarqué à bord d’une frégate dès la fin de l’exercice. Cette solution de brouillage bimode (radiofréquences de télépilotage et GNSS système de navigation global par satellite) génère une bulle de protection contre les drones et armements à guidage GNSS en bloquant les capacités de positionnement, de navigation et de pilotage de ces engins. Il peut être employé contre des drones aériens ou de surface. Le succès opérationnel a été au rendez-vous avec un drone aérien de grande taille hostile qui a été brouillé et neutralisé en opération, quelques semaines après Wildfire.

« Les essais ont été suffisamment probants pour le faire partir immédiatement après l’avoir expérimenté », explique un officier, qui souligne que cette rapidité d’exécution est rendue possible grâce à la combinaison entre Wildfire et démarche Perseus. Cette dernière vise à permettre aux militaires de tester eux-mêmes, en conditions réelles durant une opération ou un exercice de préparation au combat, des innovations prometteuses issues des laboratoires d’expérimentation des forces maritimes ou de l’industrie de défense. Pour les industriels, il s’agit d’un laboratoire grandeur nature pour améliorer leurs systèmes. Cette approche en boucle courte permet d’accélérer l’emploi et l’intégration de nouveaux systèmes, donc de répondre plus rapidement à des besoins opérationnels.

« Cela permet de couvrir différents domaines de vulnérabilité des drones. Il faut s’adapter en permanence à l’évolution de la menace, que l’on peut contrer avec des systèmes variés sur étagère, peu coûteux et que l’on va garder le temps qu’ils restent efficaces ».

Marine et industriels se placent donc dans un rythme d’innovation rapide adapté face à des cycles d’évolution des menaces drones qui se raccourcissent sans cesse.