Base d’aéronautique navale de Hyères : un siècle d’histoire et d’adaptation
Publié le 13/04/2025
Le 1er juin 2025, la base d’aéronautique navale (BAN) de Hyères célébrera ses 100 ans avec un meeting aérien réunissant les anciens et actuels marins du ciel. Un anniversaire ouvert au grand public.

Le 20 octobre 1920, un Hanriot HD.2 décolle du Palyvestre dans le sud- est de la France. Aux commandes, le lieutenant de vaisseau Paul Teste s’apprête à relever un défi inédit : poser un avion sur un navire en pleine mer. Ajustant sa trajectoire, il aperçoit la silhouette massive du porte-avions Béarn, réduit sa vitesse et amorce sa descente. Quelques secondes plus tard, ses roues touchent le bâtiment dans un appontage parfait. L’aviation embarquée française vient de naître.
Cinq ans après, cette ancienne plaine marécageuse d’où Paul Teste avait décollé devient la base d'aéronautique navale de Hyères. Cette année, elle célèbre son centenaire. Hydravions, chasseurs embarqués, hélicoptères : l’histoire de la BAN est celle d’une adaptation permanente, au service de la Marine nationale et des enjeux de défense en Méditerranée.
Des origines à la Seconde Guerre mondiale
Créée en 1925, la BAN de Hyères s’impose rapidement comme un bastion de l’aviation embarquée. Ses pistes voient défiler des hydravions, puis des chasseurs destinés aux porte-avions de la Marine nationale. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est occupée et fermée en 1942, avant d’être reprise par la Marine en 1944.
Dans les décennies suivantes, la base devient un haut lieu de la chasse embarquée. Corsair, Avenger, Étendard IV…, autant d’appareils qui s’entraînent aux missions d’interception et de frappe navale. Hyères accueille aussi l’école 59S, où les futurs pilotes de chasse s’initient au pilotage sur Fouga Zephyr avant de rejoindre les flottilles opérationnelles.
Le capitaine de frégate Manuel- Joris est passé à trois reprises par la base : en 1980, dans les années 2000, puis de 2018 à 2023, où il a terminé sa carrière. Il se remémore l’époque où la base était encore dédiée à la chasse embarquée : « Dans les années 1980, il y avait l’escadrille 3S, avec des Nord 262, mais aussi la 59S et la flottille 17F. Je descendais avec la flottille 12F Crusader pour des exercices interalliés avec les Américains et leurs F-14 Tomcat. »
Il se souvient également de la transition qui s’opère dans les années 2000 : c’est à cette période que Hyères s’est spécialisée dans les hélicoptères. Avec la fermeture de la BAN de Saint-Mandrier en 2004, elle devient le cœur des flottilles d’hélicoptères embarqués de la Marine de la façade Méditerranée..
Les hélicoptères, nouveaux maîtres des airs
Trois flottilles assurent aujourd’hui la puissance aéronavale de la BAN. La 31F, équipée de Caïman Marine, est spécialisée dans la lutte anti-sous-marine. Grâce à son sonar immergé, elle traque les menaces sous la surface. La 35F met en œuvre des Dauphin, assurant des missions de sauvetage en mer et de protection du porte-avions Charles de Gaulle. Enfin, la 36F, armée de Panther, est spécialisée dans la lutte antinavire, la surveillance maritime et la protection des unités de la Marine.
Ces unités s’appuient sur plusieurs pôles d'expertise comme le Centre d’expertise hélicoptères, l’École du personnel du pont d’envol (EPPE) et le Centre d’expérimentations pratiques et de réception de l’aéronautique navale (CEPA/10S). Ce dernier joue un rôle clé dans le développement des équipements de demain, en testant et validant les nouveaux matériels de l’aéronautique navale.
La BAN fonctionne 24h/24 et 365 jours par an avec plus de 1 600 personnes, dont 300 civils. Elle accueille également des aéronefs alliés et des autres armées : avions de patrouille maritime, chasseurs de l’armée de l’Air et de l’Espace, ou encore appareils engagés dans des exercices internationaux en Méditerranée. Au-delà de la maintenance des hélicoptères, la BAN est un centre de formation et de préparation opérationnelle essentiel au soutien des unités aéronavales.
En parallèle, elle joue aussi un rôle clé dans l’action de l’État en mer, en soutien des forces de surveillance maritime, des douanes et de la gendarmerie.
Fait rare en France, la base d’aéronautique navale de Hyères est un aéroport mixte, où cohabitent trafics militaire et commercial. Avec 350 000 passagers et 24 000 mouvements aériens par an, elle est un acteur économique important pour la région, tout en garantissant la priorité à ses missions militaires.
Un ancrage fort dans le territoire
Loin d’être isolée, la BAN entretient un lien étroit avec la population. Elle ouvre régulièrement ses portes aux élus, aux associations et aux jeunes lors des Journées Défense et Citoyenneté (JDC), accueillant près de 5 000 visiteurs par an.
En plus de son rôle militaire, la BAN joue un rôle environnemental. Elle se situe dans une zone naturelle protégée qui compte 204 espèces d’oiseaux et 17 de mammifères. Son service de prévention du risque animalier, en partenariat avec la Ligue de protection des oiseaux PACA, veille à concilier opérations aériennes et préservation de la biodiversité.
Un siècle après sa création, la BAN continue d’évoluer, entre tradition et modernité. Le centenaire marque une étape, mais aussi une ouverture vers l’avenir, où l’innovation et les nouvelles technologies redéfiniront les missions de l’aéronautique navale.